Réflexions
Lancement du cycle de conférence Montreuil Animaliste
7 mars 2025
Conférence de Réjane Sénac
Le 7 mars dernier, Montreuil Animaliste a eu le plaisir d’accueillir Réjane Sénac, directrice de recherche CNRS à Sciences Po, pour une conférence autour de son ouvrage Comme si nous étions des animaux, publié dans la collection "Libelle" aux éditions du Seuil. L'événement a rassemblé un public varié, soucieux d’explorer les implications politiques et philosophiques de l’antispécisme.

Une critique de l’anthropocentrisme et de l’animalisation
Dès l’ouverture de la discussion, Réjane Sénac a posé la question centrale de son livre : pourquoi et comment l’animalité a-t-elle été mobilisée pour justifier des formes d’exclusion et de domination au sein des sociétés humaines ? Elle a retracé l’usage historique de l’animalisation comme outil de hiérarchisation sociale, notamment dans le cadre du racisme, du sexisme et de la marginalisation de certains groupes.

L’auteure a souligné la contradiction profonde qui structure nos représentations : d’un côté, l’humain se définit par opposition à l’animal ; de l’autre, il en revendique certaines caractéristiques pour légitimer sa domination. Ce paradoxe alimente les résistances face aux revendications antispécistes, qui s’inscrivent dans une extension du principe d’égalité à tous les êtres sentients.

L’antispécisme : un défi pour les mouvements progressistes
Au fil de la conférence, Réjane Sénac a mis en lumière les tensions existant au sein des mouvements progressistes face à la question animale. Si l’égalité est un principe structurant de ces luttes, son application aux animaux non humains se heurte encore à des réticences, voire à des incompréhensions. Elle a ainsi invité à une réflexion sur la manière dont l’émancipation politique pourrait s’élargir pour inclure tous les êtres vivants, sans pour autant tomber dans un moralisme simpliste ou une négation des spécificités humaines.

Échanges et débats avec le public
L’intervention a donné lieu à un échange riche avec le public. Plusieurs participants ont interrogé l’auteure sur les implications concrètes de ses analyses : comment dépasser l’anthropocentrisme dans les politiques publiques ? Quels leviers existent pour faire évoluer le droit animal ? D'autres ont souligné les résistances culturelles et philosophiques à l’antispécisme, notamment dans les cercles féministes et antiracistes, ouvrant ainsi une discussion sur les alliances et les conflits entre luttes sociales et luttes animales.

Réjane Sénac a plaidé pour une réévaluation de nos cadres politiques afin d’inclure pleinement la question animale dans un projet d’émancipation collective. Son intervention a offert une perspective stimulante et critique sur les défis qui attendent les défenseurs des animaux dans leur quête de justice. Cette première conférence a été une occasion précieuse de nourrir la réflexion sur les fondements de notre rapport aux autres êtres vivants et de repenser ensemble les contours d’une égalité véritablement inclusive.
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